Changements climatiques

Afrique, il est temps d’obliger les grands pollueurs à payer

Les mobilisations de masse et les marches qui se déroulent à travers le monde rendent ces moments très intéressants. Des États-Unis à l’Europe, les peuples d’Asie et d’Afrique disent que ça suffit et demandent la fin d’une injustice systémique globale.

Ironiquement, ces marches ont lieu à cette période de l’année où normalement, des centaines de délégués gouvernementaux et des militants pour la justice climatique du monde entier convergent généralement vers Bonn en Allemagne pour évaluer les stratégies et les progrès de la politique climatique, y compris l’Accord de Paris, sur sa capacité à faire face à  la crise du changement climatique. La réunion de cette année n’aura pas lieu; à cause de la pandémie COVID-19 qui a affectée le monde entier.

Plutôt que de déplorer la situation et de ne rien faire, les militants initialement conviés pour assister aux intersessions de Bonn, ont décidé d’élaborer une stratégie sur la manière de renforcer l’appel à obliger les grands pollueurs à payer,qui  était lancé pour la première fois lors du Sommet sur l’action climatique du Secrétaire général de l’ONU tenu à New York, en septembre 2019. Au sommet, plus de 220 organisations et 199000 personnes de près de 70 pays – y compris de la région africaine – ont lancé cet appel international aux dirigeants mondiaux pour qu’ils tiennent pour responsables les industries et les entreprises qui ont sciemment alimenté et continuent d’aggraver la crise climatique. Cet appel a déjà un impact – en juin, deux juridictions des États-Unis – Minnesota et Washington D.C. – ont intenté des poursuites contre des acteurs de l’industrie des combustibles fossiles, dont Chevron, Shell, BP et Exxon Mobil. Alors que les impacts du changement climatique diffèrent d’une région à l’autre, l’Afrique, qui contribue le moins à la crise, porte le plus lourd fardeau sous forme d’inondations dues à l’élévation du niveau de la mer et à la perte des moyens de subsistance qui en résulte.

Du delta du Niger au Nigéria, où l’extraction de combustibles fossiles a entraîné la mort de poissons jonchant les côtes, à l’Afrique du Sud où les terres tribales ont été empoisonnées par les mines de charbon, les communautés locales deviennent plus vulnérables aux impacts climatiques, avec notamment les maladies et les conflits sociaux. Un exemple classique est le cyclone Idai – parmi la pire tempête tropicale à visiter l’Afrique. Lorsque la tempête a frappé le continent en 2018, l’épicentre était Beira, dans le centre du Mozambique. Mais il a semé  la destruction à Madagascar, au Malawi et au Zimbabwe, tuant au moins 1303 personnes et affectant plus de 3 millions d’autres. L’ampleur de cette catastrophe a surpris les populations du continent et a été considérée comme une prémonition de ce qui est à venir. Après cela, il y a eu la pire sécheresse en Afrique du Sud depuis 1000 ans en raison de la diminution des précipitations, des attaques apocalyptiques de criquets au Kenya et en Ouganda qui menacent désormais la sécurité alimentaire en Afrique de l’Est, et bien d’autres événements jusque-là étranges pour le continent africain.

Pour cette raison, les militants de la justice climatique mobilisent des signatures pour insister sur leurs demandes que les gouvernements de la région les prennent au sérieux, tiennent les grands pollueurs responsables et les obligent à payer. La lettre de signature détaille le fait que les sociétés multinationales ont pendant des décennies induit le monde en erreur sur les conséquences de leurs produits et pratiques commerciales, exploité les communautés locales, saisi nos terres et nos ressources et pris le contrôle de nos systèmes alimentaires, le tout pour leur propre bénéfice. Il est rapporté en outre que les grands pollueurs ont laissé l’Afrique exposée et mal équipée pour toute crise, d’où la nécessité de les tenir responsables, sur le plan juridique, financier et civil.

Le moment est venu pour les décideurs en Afrique de jouer un rôle essentiel pour faire payer les grands pollueurs et pour protéger la vie et les moyens de subsistance des Africains, en particulier ceux des communautés de base et de première ligne, de ceux qui les voient et les traitent comme des objets jetables.

Nous nous joignons à nos frères et sœurs à travers l’Afrique et le monde pour dire que, trop c’est trop. Il est temps d’obliger les grands pollueurs à payer!

Par Philip Jakpor & Helen Neima 

Contacts:

Jakpor Philip <pjakpor@cappaafrica.org>

Hellen Kaneni <climate@corporateaccountability.org

Vous pourriez également aimer

Changements climatiques Mines

L’invention qui change l’air en eau potable

Beth Koigi, jeune entrepreneuse originaire du Kenya, a imaginé et conçu un système capable de transformer l’humidité de l’air en
Agriculture Changements climatiques Écosystèmes

Cop 25 : Désistement brutal du Chili

À l’origine de ce renoncement, des manifestations violentes contre le gouvernement dans les rues de la capitale Santiago. La colère