Les pluies constituent un moyen de se faire des sous. Certains habitants de Ngaoundéré, tous âges confondus, se livrent au ramassage de sable issu des eaux de ruissellement, au grand dam de l’environnement qui connait une dégradation avancée.
Les quartiers de la ville de Ngaoundéré vivent un phénomène devenu banal pourtant très lourd en termes de conséquences pour les populations. Pendant la saison des pluies, les enfants et mêmes les adultes se livrent au ramassage de sables dans les petites rigoles et autres fissures créées par les eaux de ruissellement. Déjà mal aménagée, la ville de Ngaoundéré rencontre d’énormes difficultés dans le drainage des eaux des pluies. L’activité des ramasseurs de sable en saison des pluies participe malheureusement à ce mauvais décor qu’offrent déjà les quartiers de la ville de Ngaoundéré. A leur manière, les ramasseurs de sable accentuent les menaces qui pèsent sur l’environnement urbain de Ngaoundéré.
Activité lucrative
Pour les acheteurs et autres personnes qui ont des chantiers en cours dans la ville, une benne de sable à Ngaoundéré coûte dans les 150.000f, d’où le recours à ce sable issu des eaux de ruissèlement, « C’est difficile pour nous de pouvoir acheter un camion de sable ici à Ngaoundéré. Le sable que la plupart des personnes utilisent dans la ville de Ngaoundéré pour les constructions vient des arrondissements de Mbé et de Ngan-Ha. Ce n’est pas donné à n’importe qui d’acheter un camion de sable. On profite de la pluie pour ramasser le sable. Parfois avec 500f on peut avoir une brouette de sable auprès des enfants qui ramassent ce sable et ça nous aide », soutient Ousmaïla, acheteur.
Pendant cette période de pluies, c’est quasiment le « pointage » pour ces enfants qui se livrent au ramassage de sable. « Je profite des pluies pour ramasser le sable que je vends directement aux papas qui ont des chantiers. Si c’est beaucoup, les gens viennent acheter avec les tricycles. Ça me permet d’avoir un peu d’argent de poche. Je ramasse le plus souvent lorsque la pluie baisse un peu », explique Ousman Chérif, ramasseur de sable rencontré au quartier Gada-Mabanga.
Le recours à ce genre de sable contribue d’une manière ou d’une autre à l’accentuation de l’érosion dans cette ville, surtout dans les quartiers où les aménagements destinés à l’évacuation des eaux n’existent pas. Selon un géographe spécialisé, « la ville de Ngaoundéré vient d’adopter son plan directeur d’urbanisme il y a à peine 4 ans. Les quartiers existant déjà sans ouvrages d’évacuation, les activités des ramasseurs de sable, bien que permettent à ceux-ci de se faire un peu de sous, contribue par la même occasion à créer des petits ravins qui, à la longue se transforment en des véritables rigoles qui mettent à mal l’aménagement de la ville ». La ville de Ngaoundéré, chef-lieu de la région de l’Adamaoua bénéficie d’une forte pluviométrie, et les ravins ainsi créés sont parfois à l’origine des cas de noyades d’enfants rencontrés généralement dans la ville.
Les quartiers comme Joli Soir, Socaret, Onaref, Gada-Mabanga, Madagascar sont confrontés à ce phénomène lourd de conséquence mais banalisé par les populations. Celles-ci se trouvent être à la fois bourreaux et victimes de ses propres actions. Bien que bénéficiant d’un relief fait des petites montagnes, les voies d’évacuation créées artificiellement par les ramasseurs de sable qui se recrutent aussi bien parmi les adolescents que certains adultes constituent une réelle menace pour la viabilisation de la ville conformément au plan directeur de développement de Ngaoundéré adopté en 2016.
La pratique de ces activités remet au goût du jour la nécessité pour les élus locaux de mettre un accent sur les aménagements des quartiers. Ce qui limiterait la montée en puissance des ramasseurs de sable qui dégradent l’environnement et mettent en péril leur cadre de vie. Les travaux d’aménagement engagés par le maire de la ville, Bobbo Saliou, s’ils s’inscrivent dans la durée pourront réduire la multiplication des ravins qui portent un coup fatal à l’environnement et à la ville.
Jean BESANE MANGAM
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