Écosystèmes

Pollution de l’air domestique : 11 000 décès enregistrés dans les ménages du fait de la cuisson des aliments

Selon le Pr. Bertrand Hugo Mbatchou, le Cameroun enregistre 11 000 décès par an dus aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). 18 % des décès sont découlent des accidents vasculaires cérébraux, 27 % des cardiopathies ischémiques, 20 % à des broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO), 8 % des cancers du poumon et 27 % à des pneumonies.

Ces chiffres ont été présentés par l’investigateur principal du Clean Air Africa au Cameroun (projet initié par l’Hôpital général de Douala), au cours de l’activité de restitution de l’étude : « Health impacts from cooking smoke : study of lung function and air pollution from cooking fuels in Mbalmayo, Cameroon », ce 28 aout 2024, à Mbankomo, dans le département de la Mefou et Akono, région du Centre. Le Pr. Zoung Nanyi Epse Bissek Anne Cécille, cheffe de la Division de la recherche opérationnelle en santé du ministère de la Santé publique (DROS), a présidé la cérémonie.

La pollution environnementale liée à l’utilisation du bois de chauffe et du gaz domestique est un problème de santé publique. Lorsque des combustibles solides tels que le bois, les déchets de culture et le charbon de bois sont utilisés, de la fumée peut s’accumuler à l’intérieur. Selon l’Organisation mondiale de la santé, la pollution environnementale liée à l’utilisation du bois de chauffe et du gaz domestique est responsable de jusqu’à 3,8 millions de décès prématurés chaque année. Selon le Pr. Bertrand Hugo Mbatchou, le Cameroun enregistre 11 000 décès par an dus aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). 18 % des décès sont dus à des accidents vasculaires cérébraux, 27 % à des cardiopathies ischémiques, 20 % à des broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO), 8 % à des cancers du poumon et 27 % à des pneumonies.

Ces chiffres ont été présentés par l’investigateur principal du Clean Air Africa au Cameroun (Hôpital général de Douala), au cours de l’activité de restitution de l’étude : « Health impacts from cooking smoke : study of lung function and air pollution from cooking fuels in Mbalmayo, Cameroon », ce 28 aout 2024, à Mbankomo, dans le département de la Mefou et Akono, région du Centre. Le Pr. Zoung Nanyi Epse Bissek Anne Cécille, cheffe de la Division de la recherche opérationnelle en santé du ministère de la Santé publique (DROS), a présidé la cérémonie.

La pollution de l’air est la contamination de l’environnement intérieur ou extérieur par tout agent chimique, physique ou biologique qui modifie les caractéristiques naturelles de l’atmosphère. Au Cameroun, les particules fines sont plus nombreuses à l’intérieur des habitations qu’à l’extérieur. 80 % des ménages utilisent les combustibles solides (bois, charbon, etc….) à la cuisine, contre 19 % pour le gaz domestique. Dans les ménages, le niveau de particules fines est 4 à 55 fois plus que le niveau recommandé par l’OMS (travaux de Clean Air Africa/Cameroun).

Le feu de gaz dégage moins de fumée, de coût relativement élevé. Ce type de combustible est utilisé surtout en ville par des foyers plus ou moins aisés. Le feu de bois est beaucoup utilisé en zone rurale ; le coût est insignifiant parce que le bois est accessible à tous. Cependant, son usage émet une fumée opaque, gênante ; le feu de charbon qui est la résultante du bois dégage aussi de la fumée. Les chercheurs ont analysé 23 études portant sur 9 411 cas de cancer en Chine et ont révélé non seulement que les femmes qui cuisinaient sans avoir accès à une bonne ventilation dans la cuisine avaient un risque plus élevé de cancer du poumon, mais aussi que les différentes méthodes de cuisson avaient des effets différents. Par exemple, les sautés augmentent le risque de cancer du poumon, alors que les fritures n’en augmentent pas le risque.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que, chaque année, plus de 2 millions de personnes meurent du fait de l’inhalation de particules fines présentes dans l’air intérieur et extérieur. Dans les pays développés comme dans les pays en développement, les principales causes de pollution atmosphérique sont : les moyens de transport motorisés, les industries petites ou grandes, l’utilisation de biomasse et de charbon pour la cuisine et le chauffage, ainsi que les centrales électriques au charbon. Au Cameroun, les maladies dues aux infections pulmonaires connaissent une progression permanente puisqu’en l’espace de 10 ans, elles se sont multipliées par 2 (rapport du Centre de pneumophysiologie de l’hôpital Laquintinie de Douala, février 2006). Elles devancent maintenant les maladies diarrhéiques et le paludisme. La pollution atmosphérique à laquelle la pollution automobile contribue majoritairement en serait la cause essentielle.

Les estimations montrent que la charge de morbidité attribuable à la pollution atmosphérique est à présent comparable aux autres risques majeurs pour la santé dans le monde, tels que le déséquilibre de l‘alimentation et le tabagisme ; la pollution atmosphérique est actuellement reconnue comme étant la plus importante menace environnementale pour la santé humaine.

En réponse à cette prise de conscience croissante, la Soixante-Huitième Assemblée mondiale de la santé a adopté la résolution WHA68.8 intitulée « Santé et environnement : agir face aux conséquences sanitaires de la pollution de l’air », qui a été approuvée par 194 États membres en 2015. Cette résolution mentionnait la nécessité de redoubler d’efforts pour protéger les populations face aux risques sanitaires posés par la pollution atmosphérique. En parallèle, les Objectifs de développement durable des Nations unies ont été conçus pour lutter contre la menace que constitue la pollution atmosphérique pour la santé publique, au moyen de cibles spécifiques de réduction de l’exposition à cette pollution et de la charge de morbidité due à l’exposition domestique et à l’air ambiant.

Elvis Serge NSAA

Interview

Pr Mbatchou Ngahane Bertrand Hugo

« L’exposition à la fumée de bois ou de charbon est nocive à la santé »

Selon le professeur agrégé de Pneumologie, responsable de l’unité de pneumologie et chef du département de Médecine et spécialités à l’Hôpital général de Douala, l’une des recommandations les plus simples qui peut être pratiquée et appliquée en zone rurale, c’est d’éviter les foyers de cuisine ou de charbon à l’intérieur des habitations.

Pr Mbatchou Ngahane Bertrand Hugo, quelle est la singularité de cet atelier ?

Il faut dire que nous sommes une équipe de recherche sur la pollution de l’air, logée à l’hôpital général de Douala. Nous avons réalisé un travail de recherche sur la relation entre pollution de l’air intérieur et santé respiratoire dans la localité de Mbalmayo. Nous sommes ici aujourd’hui pour la restitution des résultats de ce travail de recherche avec l’accompagnement de la division de la recherche opérationnelle en santé Dros, du ministère de la Santé publique.

Est-ce que vous pouvez présenter les résultats de vos recherches ?

Ce travail consistait à comparer les manifestations respiratoires chez deux populations : une population des femmes utilisant le gaz domestique, principalement pour la cuisson des aliments, et une deuxième population, celle des ménages utilisant des combustibles solides pour la cuisson des aliments, c’est-à-dire, le charbon et le bois pour la cuisson. Nous avons obtenu des résultats assez satisfaisants qui montrent que les symptômes respiratoires et non respiratoires comme les céphalées sont plus importants chez les dames qui utilisent les combustibles solides pour la cuisson des aliments. Nous avons aussi mesuré la capacité respiratoire de ces deux groupes de dames.

Les dames qui utilisent les combustibles comme le bois et le charbon et qui sont exposées à la fumée liée à ces combustibles ont une fonction respiratoire inférieure à celle des dames qui utilisent d’autres énergies, notamment le gaz domestique qui produit peu de fumée et qui est moins polluant.

Vous préconisez l’utilisation du gaz tout simplement ?

Dans un contexte qui est le nôtre, il faut tenir compte des autres réalités culturelles, sociales et économiques pour recommander tel ou tel combustible. Il est important pour nous de donner ce message en disant que l’exposition à la fumée de bois ou de charbon est nocive à la santé. Nous avons retrouvé les niveaux de pollution jusqu’à 50 fois plus que le niveau recommandé par l’Organisation mondiale de la santé.

Dans nos ménages, nous devons le savoir et il y a des recommandations qui ont été faites pour réduire cette exposition. Il faut migrer vers l’énergie propre, notamment le gaz ou l’électricité, mais si on doit rester parce qu’on ne peut pas en utilisant les combustibles du bois et du charbon, il faut savoir comment les utiliser. L’une des recommandations les plus simples qui peut être pratiquée et appliquée en zone rurale, c’est d’éviter les foyers de cuisine ou de charbon à l’intérieur des habitations. On peut bien à l’extérieur des habitations avoir un coin où on peut préparer. Ainsi, la fumée qui s’échappe de la combustion du charbon de bois va entrer dans l’atmosphère et la femme qui prépare va échapper à la fumée.

Dans nos travaux de recherche, on a retrouvé les cuisines sans fenêtre. Nous recommandons qu’il ait des ouvertures larges pour que les fumées puissent s’évaporer à l’extérieur. Nous recommandons aussi à ces ménagères de ne pas rester à côté du feu pour attendre la nourriture cuire. Avec ces mesures, on a une réduction de l’exposition à la fumée.

À côté de ces mesures individuelles, nous avons des mesures collectives. Nous interpellons les décideurs politiques pour qu’ils accompagnent ces populations dans cette transition des énergies dites polluantes aux énergies plutôt moins polluantes à travers peut-être des subventions, des programmes nationaux de lutte contre la pollution de l’air de l’intérieur de la maison. Nous avons besoin de l’accompagnement du gouvernement que les organisations de la société civile ou bien des organismes internationaux, des partenaires de notre pays pour accompagner les institutions académiques de notre pays ou les écoles de formation à sensibiliser, à introduire les modules vrais sur la pollution de l’air et santé. Ce sont ces recommandations-là, en termes de sensibilisation des populations, d’éducation des populations, des médecins et des infirmiers, que nous pouvons arriver à réduire l’exposition de nos populations à la pollution de l’air.

Propos recueillis par Elvis Serge NSAA

 Lire aussi: Berceau de la biodiversité, L’Afrique lutte pour sa préservation grâce aux subventions de l’UICN

Vous pourriez également aimer

Biodiversité Écosystèmes

Je déclare la nature non coupable !

L’idiot pourrait également réaliser que la nature est muette. Qu’elle parle un langage bien différent du nôtre. Qu’elle ne réfléchit
Écosystèmes Mines

Marée noire au Brésil : Les autorités tiennent le «fauteur»

Il a fallu attendre plus de 60 jours, pour identifier l’origine de cette marée noire qui a souillé plus de