Forêts

Yoko: Quand la conservation de la forêt devient un moteur de développement

En 2010, la commune de Yoko, située dans la région du Centre au Cameroun, a fait un choix audacieux: privilégier la conservation de sa forêt communale au détriment de l’exploitation forestière. Le choix, loin d’être anodin, s’inscrit dans une démarche globale de préservation de la biodiversité et de lutte contre les changements climatiques. Ce pari, soutenu par la coopération allemande et inscrit dans le cadre des initiatives REDD+, a transformé cette localité en un véritable laboratoire de développement durable.

 

En vue de contribuer à la mise en œuvre des mesures d’adaptation et d’atténuation aux effets des changements climatiques au niveau local et même mondial, la Commune de Yoko s’est engagée depuis 2010 à promouvoir le développement durable sur son territoire. Cela s’est concrétisé par trois actions majeures: la création d’un nouveau quartier administratif doté d’un poumon écologique qu’est une forêt urbaine en création de 3 ha, la construction d’un centre éco-touristique intégré et la construction de logements en blocs de terre stabilisés, dont la fabrication nécessite peu d’énergie.

 

Yoko : Le vert qui fait la différence

La commune de Yoko, qui possède une forêt d’environ 30.000 ha, s’est inscrite dans un changement de paradigme novateur à savoir: « Ne pas couper le bois, mais conserver les ressources naturelles » a indiqué Dieudonné Annir, le maire de Yoko qui rajoute que : « C’est un énorme sacrifice, mais nous sommes convaincus que c’est l’avenir de notre commune et de notre pays. ». La commune a répondu à un appel à candidature pour la mise en œuvre de projets REDD+. Le projet de Yoko a été retenu, et des financements ont été accordés pour une première phase de six mois soit de janvier à juin 2018. Cela a permis à Yoko de devenir la première commune forestière de l’Afrique centrale à surseoir à l’exploitation industrielle de sa forêt et à la commercialisation du bois. Cet engagement représente un énorme sacrifice : le manque à gagner est estimé à 1,15 million d’euros par an. Ce projet, dont l’objectif général est de lutter contre les effets négatifs des changements climatiques tout en améliorant le bien-être des communautés, a une durée de trente ans ; il nécessitera un budget estimé à environ 2 milliards de FCFA.

 

 

La commune de Yoko et la coopération allemande, unies pour un développement durable

La commune de Yoko et la coopération allemande ont établi une collaboration solide et fructueuse axée sur trois initiatives de développement durable. Avec un financement total de près de 12 milliards de francs CFA, ces projets ont permis d’apporter des changements significatifs dans la commune et de favoriser l’autonomie des communautés locales.

Le premier projet, d’un montant de 65 millions de francs CFA, s’est concentré sur l’aménagement de la forêt communale de Yoko. Grâce à cette initiative, des plantations communautaires ont été créées, permettant la plantation de près de 60 hectares de tecks en un an. Cette démarche vise à assurer la durabilité des ressources forestières et à fournir du bois de qualité pour l’industrie locale et internationale.

Le deuxième projet, d’une valeur de près de 6 milliards de francs CFA, a permis la création d’unités de transformation pour les femmes de la commune. En partenariat avec le ministère des Travaux publics, des usines ont été construites, offrant ainsi de nouvelles opportunités économiques aux femmes. De plus, des pépinières ont été mises en place pour favoriser la culture d’agrumes et de ndjansang, permettant ainsi l’amélioration des conditions de vie des familles.

En ce qui concerne le projet foncier, la commune de Yoko a été choisie pour participer à la révision de la politique foncière du Cameroun. En collaboration avec la commune de Nanga-et-Boko, des tests sont en cours pour l’utilisation de satellites dans la gestion foncière et la résolution des conflits liés à la terre. Cette approche novatrice prend en compte les pratiques et les coutumes des communautés locales, ce qui en fait un exemple unique au Cameroun.

Grâce à cette collaboration avec la coopération allemande, la commune de Yoko a également vu un impact positif sur d’autres domaines. Des étudiants de l’université de Dschang ont pu mener des recherches dans la forêt communale de Yoko, contribuant ainsi à la recherche scientifique. De plus, des initiatives de conservation de la faune, telles que la protection des chimpanzés et des pangolins, ont été mises en place pour préserver la biodiversité de la région. « Des efforts sont actuellement déployés pour étudier et protéger ces grands primates. Aussi, la commune a mis en place un programme de sauvegarde des pangolins, ces mammifères écailleux menacés d’extinction. » Fait savoir le maire de la commune.

L’éco-quartier administratif résidentiel de Yoko, lancé en 2010, est un exemple concret des réalisations de la commune. Il regroupe diverses infrastructures, telles qu’un hôtel, un centre culturel, une école bilingue et des logements sociaux, créant ainsi un environnement harmonieux pour les habitants.

Le coût total du projet s’élève actuellement à près de 6 milliards de francs CFA, et il est prévu de continuer sur le long terme. La commune de Yoko se réjouit de la présence et de l’implication de la coopération allemande dans ces initiatives. La collaboration étroite entre les deux parties a permis d’apporter des changements significatifs dans la commune et de favoriser un développement durable.

Cette coopération exemplaire entre la commune de Yoko et la coopération allemande démontre l’importance de la synergie entre les acteurs locaux et internationaux pour le développement des communautés. Grâce à ces initiatives, Yoko se positionne comme un modèle de gestion durable des ressources naturelles et de développement communautaire au Cameroun.

Un modèle à suivre pour le Cameroun et l’Afrique centrale

L’exemple de Yoko montre qu’il est possible de concilier développement économique et protection de l’environnement. Cette initiative a un impact positif non seulement sur la biodiversité locale, mais également sur le climat mondial. En effet, les forêts jouent un rôle crucial dans la séquestration du carbone et la régulation du climat. « Nous sommes fiers d’être à l’avant-garde de la conservation en Afrique centrale », déclare magistrat municipal. « Notre projet montre qu’avec de la volonté politique et le soutien de partenaires internationaux, nous pouvons construire un avenir durable pour nos communautés et pour la planète. »

Si les résultats obtenus à Yoko sont encourageants, de nombreux défis restent à relever. La pérennisation du projet nécessite un financement durable et une implication continue des populations locales. Il est également important de renforcer la coopération entre les différentes parties prenantes (État, collectivités locales, société civile, secteur privé) pour assurer la réussite de cette initiative.

Le projet de Yoko a déjà reçu de nombreuses récompenses et a attiré l’attention des autorités nationales et internationales. « Nous espérons que notre expérience pourra inspirer d’autres communes du Cameroun et contribuer à la lutte contre le changement climatique », conclut le maire de la commune, Dieudonné Annir Tina.

Mireille Siapje

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